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© CNRS - 2023
Numéro de notice
7757
Forêts, au coeur d'un refuge climatique
Nous le savons tous instinctivement : la température est en général plus fraîche au coeur d'une forêt. Mais peut-on aller plus loin et mesurer ce microclimat de manière plus précise, à l'échelle de quelques mètres ? Les scientifiques du projet IMPRINT se sont lancés dans l'aventure en équipant notamment trois forêts françaises de centaines de capteurs de température. Au fil de leur étude, les forêts révèlent peu à peu leur fonction de climatiseurs naturels.
Durée
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Son
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Transcription
Commentaire voix-off
A quoi ressemblera le climat de ces forêts et la biodiversité qu'elles abritent dans les années à venir ? Face aux changements climatiques, les scientifiques et les gestionnaires forestiers sont de plus en plus préoccupés par l'évolution de la température au sein de ces écosystèmes. Les forêts recouvrent près d'un tiers de la surface de la France métropolitaine, mais sous le couvert des arbres règne un climat pourtant largement méconnu.
Nous le savons tous instinctivement la température est en général plus fraîche au coeur d'une forêt. Mais peut-on aller plus loin et mesurer ce microclimat de manière plus précise, à l'échelle de quelques mètres ?
Eva Gril, Jonathan Lenoir et Fabien Spicher se sont lancés dans l'aventure à travers un projet de recherche baptisé IMPRINT.
Ce matin-là, ces scientifiques parcourent la forêt de Mormal, une forêt publique gérée par l'Office national des forêts, à quelques kilomètres de la frontière belge, pour collecter des données enregistrées par leurs capteurs.
Jonathan Lenoir
On branche.
Eva Gril
Ce petit outil qu'on voit ici, qui est accroché à un arbre, c'est un capteur de température qui va simplement mesurer en continu la température toutes les heures, en fait, qu'on laisse pendant un an avant de venir changer les batteries et récupérer les données. Et ça nous permet en fait de suivre la température qu'il fait à différents endroits dans la forêt.
Ces capteurs, on les a installés à plein d'endroits dans la forêt, dans une soixantaine de placettes, donc de sites d'étude. Et on les a placés dans endroits qui sont finalement assez différents en termes de structure de la forêt. Par exemple ici, donc, un jeune peuplement ailleurs, ça va être des peuplements matures, des peuplements plus ou moins ouverts, plus ou moins hauts, et cetera. Donc on cherche vraiment à capturer ces différences de structure à l'échelle de la, du massif forestier.
Commentaire voix-off
En plus des 9000 hectares de la forêt de Mormal, les scientifiques ont installé des réseaux de capteurs dans la forêt de Blois, dans le centre de la France et de l'Aigoual dans le sud, couvrant ainsi différents types de forêts, de plaines et de montagne. Les informations recueillies par les capteurs doivent permettre de mieux définir et de modéliser le microclimat forestier.
Eva Gril
Le microclimat forestier, c'est tout simplement le fait que la température, quand elle fluctue en forêt, très souvent, elle est moins extrême, plus stable que le milieu extérieur. En clair, la journée, il fait moins chaud, la température maximale est réduite et la nuit, ça s'est un peu moins connu, il fait un peu plus chaud, donc la température minimale est un peu relevée.
Il y a une énorme variabilité de température, même au sein d'un même massif. Vous vous donnez un ordre de grandeur à un même instant, on a mesuré jusqu'à 18 degrés d'écart au sein d'une forêt. Donc c'est assez énorme. Et ça montre bien l'intérêt de, finalement, s'intéresser à ce microclimat forestier qui va être extrêmement variable et va donc impacter la biodiversité qui va devoir subir ou en tout cas vivre avec cette température.
Commentaire voix-off
Jusqu'ici, pour déterminer le climat forestier, les chercheurs ne disposaient que des relevés de stations Météo France comme celle-ci, installées dans des environnements ouverts, loin du couvert des arbres. Des données qui ne correspondent pas aux conditions climatiques ressenties par la biodiversité du sous-bois et trop peu fréquentes pour analyser en finesse les variations de température au sein d'une forêt.
Désormais, sur les 60 sites d'étude installés en forêt de Mormal, la mesure de température s'effectue à l'aide de deux capteurs, l'un fixé au tronc d'un arbre pour mesurer la température de l'air, l'autre enterré à huit cm pour mesurer la température du sol.
Jonathan Lenoir
Les données telles qu'elles sont disponibles à une échelle nationale, comme la France, sont en termes de résolution de l'ordre du kilomètre au plus fin et ce sont des données mesurées par des postes météo. Avec notre réseau de capteurs, on va créer finalement une maille plus fine. Pour l'instant, on est capable, nous, de modéliser le microclimat sous le couvert forestier, ici à dix mètres de résolution.
Ce qui nous permet finalement, dans un pixel de un kilomètres par un kilomètre, d'avoir énormément d'informations à dix mètres de résolution.
Commentaire voix-off
En plus de la température, les chercheurs mesurent sur chacun de leurs sites d'étude différents paramètres : le diamètre et la hauteur des arbres, le relief de la zone, et ils procèdent aussi à un inventaire de biodiversité végétale.
Fougères, ronces, musules, mousses, des espèces de plantes sont ainsi associées au microclimat du site. Certaines d'entre elles se révèlent plus sensibles aux variations de température et sont donc plus exposées au changement climatique global.
Fabien Spicher
Tous les inventaires botaniques que l'on peut réaliser au sein de ces différents massifs nous aident à mieux comprendre, en fait, comment chacune des espèces va répondre aux paramètres micro climatiques. Et ça va nous permettre, avec éventuellement des perspectives à plus long terme, de pouvoir en fait essayer de comprendre si, avec des augmentations de température de deux ou trois degrés, on pourrait avoir dans des peuplements identiques, la diminution ou l'augmentation de la fréquence de certaines espèces.
Commentaire voix-off
Parmi les centaines d'espèces qui peuplent ces forêts, certaines résistent parfois à l'oeil des botanistes. Pour lever les doutes quant à leur identité, les scientifiques collectent la partie la plus représentative de la plante, puis la placent dans un herbier, pour pouvoir l'observer et la comparer à une collection de référence, située à 150 kilomètres de là, à Amiens. C'est ici, à l'université de Picardie Jules-Verne, que les données de température et des végétaux prélevés à Mormal vont être scrutées de plus près. Des éléments qui permettront d'améliorer les prédictions de la distribution des espèces forestières face aux changements climatiques. Encore faut-il pouvoir nommer certains spécimens, parfois rares. Et pour obtenir une vue d'ensemble du phénomène de microclimats forestiers, cartographier la température du sous-bois à fines échelles, l'équipe d'IMPRINT s'appuie sur une technologie baptisée Lidar, un laser télémétrique embarqué à bord d'un avion. Et voici le résultat : la forêt de Mormal apparaît dans toute sa complexité à travers un gigantesque nuage de points en 3D, des couleurs correspondant à l'altitude de chacun des éléments. En ajoutant les données de terrain à ce modèle, les scientifiques sont parvenus à comprendre comment la structure de la forêt pouvait expliquer le microclimat.
Eva Gril
Notre étude elle est focalisée sur trois forêts en France. Mais le but, c'est de pas s'arrêter là, forcément, mais d'essayer de s'intéresser à toutes les forêts françaises et même au-delà. On espère pouvoir s'appuyer sur la couverture de l'Institut géographique national, l'IGN, qui a prévu de couvrir toute la France au Lidar. On pourrait du coup s'appuyer sur la structure en 3D pour pouvoir essayer de projeter quelle est la température du sous-bois sur toutes les forêts françaises.
Commentaire voix-off
Puits de carbone et sources de bois, les forêts révèlent aussi peu à peu leur fonction de climatiseur naturel, qui influence localement le climat. A l'avenir, le projet IMPRINT doit permettre d'informer la gestion forestière sur son impact sur le climat du sous-bois et de déterminer des zones clés de refuge climatique pour la biodiversité, des outils pour tenter de préserver encore longtemps ce paradis végétal.