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© CNRS - 2022
Numéro de notice
7525
Voir avec ses mains
Longtemps on a cru que les personnes déficientes visuelles ne pouvaient se représenter l'espace. C'est heureusement faux. Mais cette capacité doit être développée dès le plus jeune âge. À Toulouse, des chercheurs travaillent avec l'Institut des jeunes aveugles au sein du laboratoire commun « Cherchons pour voir » pour mettre au point de nombreux dispositifs. À travers des jeux, tablettes ou autres maquettes, les enfants améliorent leurs représentations spatiales.
Durée
Année de production
Définition
Couleur
Son
Version(s)
Support Original
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Transcription
Commentaire voix-off :
Lorsque nous nous déplaçons un sens est particulièrement sollicité : la vue. Elle nous aide à nous orienter, à anticiper. Mais comment font ceux qui en sont dépourvus ? À l'Institut des jeunes aveugles de Toulouse, des instructeurs en locomotion apprennent aux enfants non-voyants et malvoyants à se déplacer en sécurité.
Aujourd'hui, Pierre va devoir s'orienter sans bouger de sa chaise. Il doit parcourir avec les mains cette maquette en Lego de l'institut.
Instructrice
Là tu es dans le couloir, de quoi ?
Elève Pierre
Des cuisines.
Instructrice
Des cuisines.
Commentaire voix-off :
Pour se repérer, l'instructrice a enregistré des sons de la vraie vie.
Son enregistré
La porte est ouverte
Instructrice
OK, super.
Commentaire voix-off :
Cet outil développé par des scientifiques s'appelle la Tangible Box. Associée à une maquette, elle aide les déficients visuels à se représenter l'espace.
Diane ABDELLI – instructrice en locomotion
Arriver à se projeter sur un plan, ce n'est pas toujours évident. Alors là, Pierre, par exemple, qu'on a, qu'on a pu voir, il a une très bonne représentation spatiale et mentale. C'est assez simple pour lui. Les couloirs sont délimités par des murs, donc ça permet un meilleur cheminement sur le plan et les sons sont utilisés comme repères ici, qu'ils vont pouvoir retrouver en réel quand ils vont se déplacés dans l'IJA.
Commentaire voix-off :
L'IJA Institut des jeunes aveugles et l'IRIT Institut de recherche en informatique de Toulouse, ont créé un laboratoire commun appelé « Cherchons pour voir ». Ici, une vingtaine de scientifiques développent des outils d'assistance pour les personnes déficientes visuelles. Aujourd'hui, on teste un nouveau jeu « rituel sur le fleuve ». Bernard Oriola, ingénieur au laboratoire, l'essaye avec un ami. Tous deux sont non-voyants. Le plateau de jeu est posé sur une Tangible box, elle-même reliée à un ordinateur.
Bernard ORIOLA _ chef de projet informatique
On a fait ce plateau de jeu donc, qui, qui est interactif puisqu'au fur et à mesure qu'on se déplace sur le fleuve avec le bateau, le bateau qu'on déplace et quand il se déplace, le bateau est suivi par le logiciel qui permet de déclencher un événement. En général, c'est un son : il y a un fichier audio qui explique l'énigme ou qui donne le sens du jeu.
Commentaire voix-off :
Ce jeu permet de stimuler les représentations spatiales. Une aide précieuse pour éviter de se fier uniquement à des déplacements appris par coeur.
Bernard ORIOLA _ chef de projet informatique
Quand on a appris un trajet, c'est relativement facile. L'aveugle ne voit que le bout de sa canne si tu veux, donc il ne peut pas se rendre compte que le chemin se termine 50 mètres plus loin ou se termine pas ou il y a un embranchement, etc., tant qu'il n'est pas arrivé dessus, tu vois. Donc c'est vraiment un gain en confiance et un déstresse de pouvoir avant de comprendre un secteur, ça te donne plein de possibilités pour te sortir de toutes les embûches. Et c'est très rassurant, quoi.
Commentaire voix-off :
Pour démocratiser cet outil crucial, l'équipe a encore amélioré la Tangible Box : dans la dernière version, les pièces du cadre sont imprimées grâce à une imprimante 3D. Les plans de fabrication et la liste des matériaux seront en accès libre. Tout le monde pourra donc la confectionner pour environ 200 €.
Christophe JOUFFRAIS – neuroscientifique
On a réussi à faire un dispositif qui est extrêmement simple. Il n'y a quasiment plus rien dedans et ça marche mieux, et c'est beaucoup plus léger, beaucoup moins encombrant donc. Aujourd'hui, on a une box qui est une plaque de métal avec un cadre infrarouge qui est intégré dans un espèce de cadre qu'on a imprimé en 3D. Quelqu'un dans un centre peut, peut se faire son propre dispositif et commencer à l'utiliser quasiment gratuitement.
Commentaire voix-off :
Au-delà de développer des outils informatiques, les chercheurs essayent également de comprendre comment l'espace est perçu chez les déficients visuels.
Ici, une personne guide une autre pour éviter une attaque de zombies.
Les mouvements et la voix des participants sont enregistrées pour être analysées.
Intervenant
Il faut continuer tout droit, vraiment. Et par contre tu prends l'avant dernière sortie à droite.
Commentaire voix-off :
Les mots utilisés seront ensuite scrutés et décryptés pour comprendre quelles indications spatiales utilisent les non-voyants.
Michel JOSEPH – psychologue egonome
On constate en fait qu'ils emploient beaucoup, souvent la même perspective qui est égocentré, c'est à dire qu'ils vont se mettre à la place du jeton du pion qui se déplace, et les indications sont en fonction de l'orientation du jeton. Alors que c'est vrai que chez les participants voyants c'est beaucoup plus sûr de l'allocentré, c'est à dire qu'ils vont dire : « tu montes, tu descends et tu vas à gauche ou à droite », vu du dessus, un peu comme si on regardait une carte.
Commentaire voix-off :
L'objectif du laboratoire est justement de favoriser l'utilisation de cartes chez les déficients visuels, car on sait que plus un jeune sera exposé, plus il lui sera facile de les lire à l'âge adulte. Comme ici avec ce cours de géographie.
Dialogue entre Pierre et son instructrice :
- Pierre, est-ce que tu peux vérifier où se trouve l'Amérique du Sud s'il te plaît ? Vas-y, vérifie.
- « Amérique du Sud »
- Parfait. Tu as trouvé.
Commentaire voix-off :
L'enseignante utilise un autre outil mis au point par les chercheurs. Il s'agit d'une table tactile qui rend les dessins en relief interactifs.
Christophe JOUFFRAIS – neuroscientifique
Le fait de pouvoir toucher, entendre en même temps, cela renforce les apprentissages, la mémorisation. Et puis, on a découvert d'autres vertus, notamment le fait de limiter les inhibitions. Si t'es un apprenant que tu ne comprends pas quelque chose et que tu demandes dix fois à l'adulte, à l'enseignant. Non mais c'est quoi ? Je n'ai pas compris, c'est quoi je n'ai pas compris. Au bout d'un moment, il y a des dés inhibitions. Tu oses plu le faire alors que quand t'es sur un dispositif interactif comme ça, il y a plus d'inhibition, tu peux lui faire répéter 50 fois. Ce n'est pas gênant du tout.
Commentaire voix-off :
Conçu spécialement pour les déficients visuels, les enfants arrivent même à utiliser le menu déroulant de la table. Grâce à un système de double clic, ils peuvent lui poser des questions.
Eryne LIGALI – élève
Je viens de chercher la monnaie, le pays et la ville, et la nourriture, en Amérique du Sud.
Laurence BOULADE – enseignante spécialisée
Les aveugles n'ont quasiment jamais accès à des tablettes tactiles, surtout à cet âge-là. Plus grand, ils vont apprendre à s'en servir, à se servir d'un smartphone. Mais si petit, non, c'est un univers, le numérique et le tactile qu'ils n'ont pas. Et là, le fait de pouvoir faire comme les voyants, de pouvoir s'amuser sur un outil numérique, c'est une source de motivation pour eux énorme.
Commentaire voix-off :
Cette technologie se décline aussi sur tablette. Voici un plan avec des indices sonores. Cet après-midi, c'est chasse au trésor dans l'institut. A travers ce jeu, les enfants travaillent leurs compétences spatiales en confrontant les informations de la carte avec leur environnement, ce qui leur permet aussi de s'amuser. Avec ces dispositifs faits sur-mesure, ces jeunes peuvent pour un temps mettre le handicap de côté pour jouer afin de rester d'abord et surtout des enfants.