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© CNRS Images - 2018
Numéro de notice
6509
Un glacier sur écoute
En raison du réchauffement climatique, le glacier d'Argentière, situé dans le massif du Mont-Blanc, perd environ un mètre d'épaisseur chaque année, depuis 30 ans. Déjà équipé d'un cavitomètre, qui suit son déplacement en continu, il a été mis sur écoute à l'aide de capteurs sismiques, par les chercheurs et ingénieurs de la Mission RESOLVE. Pendant plus d'un mois, ces capteurs, disposés sur la base et en dessous du glacier, vont apporter des données plus précises sur son glissement, et pourraient permettre aux chercheurs d'en savoir davantage sur le devenir des glaciers et l'évolution climat.
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Transcription
Dans les profondeurs de la terre, les lumières de la science pourraient bientôt éclairer de surprenants phénomènes géologiques. Les visiteurs qui arpentent ce réseau de galeries souterraines sont des scientifiques en mission. Nous sommes à plus de 200m sous la surface du glacier d'Argentière non loin de Chamonix. Ces tunnels exploités par une entreprise de production d'énergie hydroélectrique ont exceptionnellement ouvert leurs portes à cette équipe de chercheurs et d'ingénieurs qui s'intéresse aux mouvements du glacier. Ils sont guidés par le glaciologue Luc Moreau qui est ici le gardien d'un véritable trésor scientifique. Le glacier d'Argentière est en effet le seul glacier au monde à être équipé d'un ingénieux dispositif appelé cavitomètre qui a permis de suivre en continu ses déplacements depuis plus de 30 ans.
Luc Moreau - Glaciologue
C'est une roue de vélo qui est placée au bout d'un bras. On a un poids de l'autre côté du bras qui plaque la roue sous le glacier qui plaque la roue sous le glacier. C'est mon prof Robert Vivian qui avait eu l'idée de cette roue en 1972, moi je suis arrivé en 1986 donc ça fait plus d'une trentaine d'années que je mesure le glissement avec cet instrument, tout ça avec un codeur sur l'axe de la roue, sur l'axe du bras, parce qu'évidemment le plafond de la cavité peut aussi varier verticalement. Tout ça est relié à une station d'enregistrement qu'on a dans une petit laboratoire et je mesure en continu toute la journée, toute l'année le glissement du glacier.
Cette installation a permis aux glaciologues d'accumuler, durant des décennies, de précieuses données sur la dynamique du glacier. Ils ont ainsi observé un ralentissement de son glissement causé par la diminution de son volume. Mais pour obtenir des données plus précises sur le comportement de ce géant l'équipe conduite par Philippe Roux va tenter de mettre le glacier sur écoute depuis sa base jusqu'à sa surface. Les chercheurs vont installer dans ces galeries douze capteurs sismiques qui enregistreront pendant un mois les vibrations à la base du glacier.
Philippe Roux – Physicien
Le glacier on a l'impression que c'est un objet fixe mais en fait c'est un objet vivant. Il se déplace en permanence. Il bouge peu l'hiver parce qu'il y a peu d'écoulements d'eau parce que l'eau est figée en glace et il commence à se déplacer au printemps. Nous nos capteurs ils mesurent en continu. On va mesurer des crevasses qui s'ouvrent et qui se ferment, les écoulements provoqués par la fonte de l'eau et puis on va mesurer le frottement. C'est à dire le frottement du glacier comme une espèce de morceau de glace qui va frotter sur le sol et qui va provoquer un bruissement qui va aussi nous servir pour comprendre la façon et la vitesse à laquelle le glacier se déplace.
Pour obtenir de telles données, les scientifiques ne vont pas se contenter de disposer des sismomètres dans ces galeries, il leur faut également déployer des instruments à la surface. Philippe Roux et son équipe ont ainsi imaginé une mission inédite baptisée RESOLVE. Son objectif : faire du glacier d'Argentière, l'espace d'un mois, le glacier le plus instrumenté au monde.
Ce géant de 19km2 perdrait environ un mètre d'épaisseur chaque année depuis 30 ans et les effets du réchauffement climatique pourraient encore accélérer cette disparition dans les années à venir. Sensibles à la température de l'air et aux précipitations, les glaciers sont d'excellents indicateurs du climat. Et le projet RESOLVE pourrait révéler leurs mécanismes internes. Pour cela, il a fallu mobiliser une équipe composée d'une quinzaine de scientifiques venus de disciplines différentes. Ils vont travailler durant 2 jours à plus de 2500m d'altitude. Un environnement à risques qui nécessite une formation d'alpinisme pour garantir la sécurité des équipiers.
Parmi eux, certains mettent en effet les pieds sur un glacier pour la première fois.
Après près de deux heures d'ascension skis aux pieds, l'équipe RESOLVE parvient sur la zone d'étude. Parmi les instruments qui vont être installés sur la surface du glacier, les capteurs sismiques intéressent particulièrement Coralie Aubert. Elle va coordonner la mise en place d'un réseau de 100 capteurs. Chaque noeud du réseau est composé d'un capteur appelé “node” et doit être installé, activé et puis vérifié, le tout en moins de 48 heures.
Coralie Aubert – Ingénieur en instrumentation
En fait les nods ce sont des sismomètres trois composantes autonomes qui sont constitués de trois capteurs, d'un numériseur intégré et d'un pack batterie. On va les positionner selon un maillage avec une distance inter-capteurs de 50m et ils vont enregistrer les déplacements durant un mois.
Installés sur des positions GPS précises, ces capteurs doivent également être calibrés. Les scientifiques ont ainsi emporté avec eux une étonnante enclume qui permet d'émettre trois types de vibrations différentes. L'un des membres de l'équipes va la frapper à trois reprises à des intervalles de temps précis. Si les capteurs fonctionnent comme prévu, les scientifiques devraient retrouver une trace des coups de masse sur leurs enregistrements - des signaux de référence pour calibrer la suite de la prise de données.... Mais la sismologie n'est pas la seule spécialité invitée sur le glacier.
D'autres équipiers s'apprêtent à déployer un radar qui va permettre de cartographier la base du glacier en trois dimensions.
Ildut Pondaven – Ingénieur
Le principe c'est qu'on envoi des ondes électromagnétiques dans le sol à une certaine fréquence. On va se balader avec cet engin qui prend quand même pas mal de place et on va faire des transects sur tout le terrain où on a planté les nods. Il y a une antenne émettrice qui est devant et une antenne réceptrice qui est derrière donc le principe c'est qu'il y a les ondes qui vont partir dans le sol et qui vont se réfléchir sur les différentes interfaces donc là ce qui nous intéresse principalement c'est le « bed rock », le rocher qu'il y a sous le glacier.
Grâce aux capteurs sismiques, aux relevés radar et aux capteurs de pression installés à 175m de profondeur, cette équipe va pouvoir collecter un ensemble de données inédites qu'il faudra venir récupérer sur ce site dans un mois. Des informations qui seront alors mises à la disposition de le communauté scientifique internationale pour espérer décoder les mystères de ces géants de glace.