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Numéro de notice
6752
Mission Rosetta
En 2004, l'Agence spatiale européenne (ESA) lance la mission Rosetta. Son objectif principal est d'analyser la composition du noyau de la comète Tchourioumov-Guérassimenko afin de mieux comprendre l'origine de l'eau et de la vie sur Terre.
Après un voyage de dix ans à travers le système solaire, la sonde Rosetta réussit le double exploit de se mettre en orbite autour de la comète, puis de déposer l'atterrisseur nommé Philaé sur le noyau cométaire. S'en suivent deux ans d'observations et d'analyses de Tchourioumov-Guérassimenko, en orbite et in situ, jusqu'à la fin de la mission, où la sonde Rosetta est allée rejoindre Philéa en se posant à son tour à la surface de la comète.
De nombreux laboratoires français, dont l'IAS, le LESIA et le LATMOS, ont été impliqués dans le développement des instruments embarqués par la sonde et son atterrisseur.
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Transcription
00 :30 Voix off
Le 2 Mars 2004, l'Agence Spatiale Européenne lance la mission Rosetta, dont le principal objectif est d'analyser la composition du noyau de la comète Tchourioumov-Guérassimenko afin de mieux comprendre l'origine de l'eau et de la vie sur Terre.
00 :45
C'est un voyage de dix années que va effectuer la sonde à travers le système solaire, avant de pouvoir réaliser deux premières mondiales, se mettre en orbite autour d'une comète, et poser sur son noyau un petit atterrisseur nommé Philaé.
01 :00
Neuf laboratoires français, dont l'IAS, le LESIA et le LATMOS, sont impliqués dans le développement des 21 instruments embarqués par la sonde et son atterrisseur, qui auront nécessité plus de onze années de développement.
01 :14 Jean-Pierre Birbring, Astrophysicien - IAS
Pourquoi on a été voir les comètes ? Parce qu'on se doutait que les comètes - formées très loin dans le système solaire, dans des endroits où il fait extrêmement froid - ont très peu évolué, dans les 4,5 milliards d'années d'évolution du système solaire. Elles ont préservé les conditions d'origine de l'évolution du système solaire, au niveau aussi bien de la dynamique que des ingrédients eux-mêmes.
01 :35
Et ce qui progressivement est arrivé par la compréhension qu'on avait de ce que sont les comètes, c'est que ce qui a donné sur terre l'émergence de structures très complexes à base de carbone, peut venir de molécules qui elles-mêmes étaient déjà présentes dans le matériau d'origine, dans la nébuleuse comme on dit, protosolaire, et que les comètes auraient pu garder tout ou partie de ces molécules-là.
01 :57
Et pour comprendre le cheminement qui va d'atomes et de molécules simples aux structures très complexes que sont les structures vivantes aujourd'hui, on a pensé que les comètes pouvaient être un des jalons essentiels de cela.
02 :12
Si on s'intéresse à ce matériau d'origine, qui est bloqué dans les noyaux cométaires, c'est que quelque part on est convaincus que l'évolution du système solaire, qui a vu l'accrétion des objets qui sont devenus les planètes comme la Terre, les planètes telluriques, a incorporé une partie de ce matériau là, et que ce sont ces glaces et ces composés carbonés présents dans le système solaire externe, qui, par l'intermédiaire des noyaux cométaires puis des astéroïdes,
ont nourri les planètes internes de ce qui est devenu l'eau liquide et les composés carbonés.
02 :45 Voix off
A l'approche du soleil, les glaces contenues dans les comètes subliment : elles passent directement de l'état solide à l'état gazeux. Se forme alors la coma, atmosphère entourant le noyau, et les queues, panaches caractéristiques des comètes.
03 :02
C'est donc loin du soleil que le rendez vous entre Rosetta et Tchourioumov-Guérassimenko doit avoir lieu, afin de permettre à la sonde d'étudier la comète lorsqu'elle est encore inactive.
03 :16
En juin 2014, les premières images du noyau sont réalisées.
03 :24 Alain Doressoundiram, Astrophysicien - LESIA
Cette comète, elle avait une forme complètement ahurissante,
à deux lobes, bi-lobée. Une espèce de tête de deux kilomètres,
et puis un corps de 4 kilomètres, certains ont vu un canard de bain, donc une forme absolument biscornue, et puis surtout, on croit voir plein de cratères, mais en fait ce n'est pas des cratères.
03 :45
C'est en fait des bassins qui se sont effondrés. Donc on assiste finalement à une géologie très très riche, aussi riche qu'un paysage tourmenté sur terre, on a des falaises, des dépressions, des bassins, des fissures, mais tout ça généré uniquement par un seul phénomène, la sublimation de la glace qui façonne finalement le paysage à la surface de la comète.
04 :10 Voix off
Pendant plus de deux mois, les instruments de Rosetta vont observer, cartographier et analyser la surface du noyau cométaire. Parmi eux, Virtis, spectroimageur infrarouge, déterminera sa composition.
04 :25 Alain Doressoundiram, Astrophysicien - LESIA
Une comète, c'est riche en glace, la glace d'eau essentiellement mais aussi d'autres glaces, et aussi mélangée avec beaucoup de poussières organiques, on appelle « organique » tout ce qui est composé de carbone. De carbone, a carbone, le méthane par exemple c'est une molécule organique mais ça peut aller à des molécules beaucoup plus complexes avec beaucoup de carbone.
04 :47 Et parmi les molécules très complexes, on en a découvert, détecté une vingtaine, dont quatre nouvelles. Parmi ces molécules complexes, on a des acides aminés. Et la sonde, la mission Rosetta a découvert un acide aminé particulier qui est la glycine, et les acides aminés c'est important pour la vie puisque c'est à la base de l'ADN.
05 :08 On ne pense pas qu'il y a de la vie sur la comète, mais on pense que les comètes riches en molécules organiques, riches en acides aminés, ont peut-être pu aussi apporter la vie sous forme de kit à la Terre.
05 :22 Voix off
12 Novembre 2014. C'est au tour de Philae d'aller analyser in situ le matériau cométaire. Vers 9h30, l'atterrisseur se détache de Rosetta et entame une chute libre de plus de 20 kms en direction de la comète qui se déplace à 135.000 km/h.
05 :42 La descente dure sept heures, et Philae touche la surface à moins de cent mètres du site visé.
Mais les rétrofusées et les harpons censés le plaquer au sol ne se déclenchent pas, et il rebondit, entame un vol plané qui durera plus de deux heures.
06 :03 Philae s'immobilise enfin dans une position inconfortable, à plus d'un kilomètre du point d'impact initial.
06 :11 Valérie Ciarletti, Astrophysicienne - LATMOS
On sait que les batteries ont soixante heures d'autonomie, et on sait que pendant ce court laps de temps, c'est vrai que c'est quand même court, soixante heures, il va falloir faire un maximum de science. Un maximum de science, ca veut dire faire tourner, il y a une dizaine d'instruments à bord de Philae et c'est un peu une course contre la montre et on essaie de faire le maximum.
06 :31 Voix off
La caméra Shiva réalise une image panoramique du site d'atterrissage qui permet de se rendre compte que Philae est à l'ombre, et ne pourra pas utiliser ses panneaux solaires pour recharger ses batteries.
06 :42 De plus, Philae est incliné. Cette position va empêcher certains instruments de fonctionner, notamment la foreuse, censée fournir des échantillons cométaires à d'autres instruments.
06 :54 Valérie Ciarletti, Astrophysicienne - LATMOS
L'instrument Cosac a été conçu pour faire de l'analyse de la composition des éléments qui devaient être recueillis par la foreuse, puis volatilisés par chauffage, analysés, et devait permettre de faire comme ça des analyses de composition du noyau.
07 :15 La chance extraordanaire de Cosac c'est qu'au moment du premier rebond à la surface de Tchourioumov-Guérassimenko, le nuage qui a été provoqué par l'atterrissage de l'atterrisseur a envoyé une partie des matériaux constitutifs du noyau un peu par chance, dans l'analyseur et donc Cosac a pu faire des mesures alors que la foreuse n'avait pas fonctionné.
07 :47 Voix off
L'analyse des résultats obtenus par les instruments de Philae et Rosetta a donc mis en évidence la présence de molécules organiques complexes au sein même du matériau d'origine du système solaire, présents dans le noyau de Tchourioumov-Guérassimenko.
07 :59 La nature de la glace d'eau présente sur cette comète s'est avérée en revanche différente de celle de notre planète.
08 :09 Dès Décembre 2014, Tchourioumov-Guérassimenko se rapprochant du soleil, devient progressivement de plus en plus active.
Rosetta va pouvoir étudier ce phénomène de dégazage si particulier dans la vie d'une comète.
08 :24 Valérie Ciarletti, Astrophysicienne - LATMOS
Alors il y a deux types d'activités que l'on a detecté, une activité assez diffuse, on voit un dégazage assez global, général de la surface et puis il y a des jets très très puissants, intermittents, qui ejectent de la matière avec beaucoup de violence, et on a identifié l'origine et on a compris que ces espèces de puits, qui font à peu près 100 mètres de diamètre et presque une centaine de mètres de profondeur, très cylindriques, sont les lieux d'origine de ces jets très puissants d'activité.
08 :50 C'est quelque chose qu'on ne soupçonnait pas, parce qu'on avait pas les moyens, on n'avait pas l'observation qui nous permettait de faire ça.
08 :56 Jean-Pierre Birbring, Astrophysicien - IAS
Un instrument, qui s'appelle Cosima, a eu la capacité de collecter des grains, et d'analyser grain par grain la composition du matériau qui a été ejecté. Et cet instrument Cosima, fait en coopération avec l'Allemagne et la France majoritairement, a montré effectivement qu'une très grande fraction des grains est riche de composés carbonés, au coeur desquels des petits minéraux sont présents, et aussi bien la face carbonée que les minéraux ont été analysés par spectrométrie de masse.
08 :28 Voix off
En Septembre 2016, alors que la comète s'éloigne à nouveau du soleil, la décision est prise de mettre fin à la mission de Rosetta. Après deux années d'observations, Rosetta va rejoindre Philae en se posant à son tour sur Tchourioumov-Guérassimenko et fournir les dernières images de sa surface lors de sa descente.
09 :51 Marc Ollivier, Astrophysicien - IAS
Ce sont des documents uniques, ce sont des sommes de travail énormes, et c'est beaucoup de temps passé quand on regarde ces missions, entre le moment où elles ont été conçues et le moment où on reçoit les données, il y a parfois vingt ans, donc sur une carrière de chercheur, des missions comme ça, au mieux vous en faites 2 ou 3.
10 :13
C'est avec ces données, ces petits sondages, ces petits points de vue, données par chacun des instruments qui sont embarqués sur les sondes que finalement, on réussit à avoir une vision un peu complète des objets. Et ce qui est intéressant, c'est qu'il n'y a aucun scientifique qui vous dira à l'issue de la mission, bon ben travail terminé, merci, je peux arrêter ma carrière, il ne pense qu'à une seule chose, c'est la mission suivante, ce qu'il y a à explorer et quels instruments il faut mettre à bord pour continuer la recherche.