Uniquement disponible pour exploitation non commerciale

© CNRS - 2024

Numéro de notice

8000

Alaska, le sol se dérobe

L'Alaska subit de plein fouet le changement climatique. Avec la hausse des températures, le pergélisol se dégrade. Sans cette couche de glace sous terre qui joue le rôle de ciment, les versants de montagnes sont fragilisés. Les glissements de terrains se multiplient menaçants les villages. Retrouvez sur le terrain, les scientifiques pour étudier avec eux le sol de l'Alaska.

Durée

00:08:52

Année de production

Définition

HD

Couleur

Couleur

Son

Sonore

Version(s)

Français

Support Original

Apple ProRes 422

Transcription


Commentaire voix-off :
Nous sommes dans le sud de l'Alaska. Ici, les paysages sont faits de montagnes à perte de vue, de gigantesques rivières et de glaciers d'un blanc éclatant. Dans cette région sauvage des États-Unis, il n'est pas rare de croiser des ours ou des élans. Mais avec le réchauffement climatique, l'Alaska se métamorphose. Partout, on peut voir des signes de la dégradation du pergélisol : des glissements de terrain, des maisons qui s'affaissent.

Sonia Collavizza :
C'est ici qu'une équipe de scientifiques a jeté son dévolu pour y étudier les effets de la dégradation du pergélisol. Mais le pergélisol, permafrost en anglais, c'est quoi exactement ?

Susan Conway :
Donc le pergélisol, en fait, c'est un état thermique. S'il y en a, de l'eau entre, entre des cailloux au lieu d'être friable comme ça, ils sont collés. Donc c'est un ciment qui fait un bloc. Et donc, quand le pergélisol avec la glace se dégrade, ça fond le ciment et ça devient en liquide.

Commentaire voix-off :
Susan Conway, planétologue au CNRS, est venue de France pour étudier avec ses collègues le sol de l'Alaska. Pour se rendre sur la zone d'étude, il faut d'abord traverser la rivière Matanuska. Nous sommes en août, seul mois de l'année où la météo est assez clémente pour permettre la mission de terrain qu'ils s'apprêtent à vivre. Le courant est puissant. Seuls les plus aguerris sont autorisés à pagayer. Plusieurs allers-retours seront nécessaires pour acheminer toute l'équipe sur l'autre rive. L'aventure se poursuit maintenant à pied. Il n'y a pas de chemin. Il faut gravir la montagne à travers la forêt avec, dans ces sacs imposants, des instruments scientifiques et du matériel de camping.
Mais soudain, les voici, les molards. Les scientifiques sont venus pour étudier ce gigantesque glissement de terrain et plus spécifiquement ces amas de pierres de forme conique, au nom géologique un peu particulier : des molards.

Susan Conway :
J'ai jamais vu autant de molards, en vrai. Des petits, les grands, partout, partout, partout, partout. Je n'ai jamais vu sur le terrain, donc c'est vraiment assez magique d'être là.

Sonia Collavizza :
Les scientifiques ont repéré cette zone grâce à des images satellites. Si ces molards sont si intéressants pour les scientifiques, c'est parce qu'ils sont le signe que ce glissement de terrain a eu lieu à cause de la dégradation du pergélisol.

Susan Conway :
Avant que c'était un cône, c'était en fait une espèce de bloc cubique cimenté avec de la glace d'eau. Donc le pergélisol et ce bloc était en fait transporté par glissements de terrain, mais le glissement, il descendait avec ces blocs. Ils ont réchauffé parce que c'est plus chaud en bas qu'en haut et donc ils se sont dégradés et s'est formé ces cônes qui s'appellent des molards.

Commentaire voix-off :
Les scientifiques souhaitent cartographier avec précision le glissement de terrain. Pour cela, ils installent d'abord une station GPS qui servira de point de repère un peu partout. Des cibles ont été placées. La position GPS de chacune a été enregistrée. Tout est prêt. C'est le moment de prendre de la hauteur.

Calvin Beck :
Aujourd'hui, nous utilisons un drone pour créer un modèle 3D du glissement de terrain, ce qui nous permet de capturer les formes de chaque molard.

Commentaire voix-off :
Pour cela, il faut réaliser de nombreux vols à des endroits bien précis le long de la pente.

Calvin Beck :
On a programmé le drone pour voler en suivant un itinéraire bien précis avec des tracés en lien avec la topographie. Nous volons à 50 mètres d'altitude, ce qui nous donne une résolution spatiale de deux centimètres. Puis nous voleront à 120 mètres avec une résolution plus faible, mais qui nous permettra de placer les vols précédents dans une carte à grande échelle.

Commentaire voix-off :
Pendant deux jours, les scientifiques vont sillonner cet immense glissement de terrain pour voir son origine, prendre de nombreux points GPS et survoler la zone encore et encore. Et pour être au plus près de la zone d'étude, ils vont camper sur place en plein milieu des molards. Mais si ce lieu est reculé, les glissements de terrain menacent également des zones plus peuplées. L'autre mission que s'est donnée Susan Conway, c'est de faire de la recherche avec la population locale. Nous sommes dans le village d'Eklutna, situé à une dizaine de kilomètres d'un lac entouré de montagnes. Si un glissement de terrain venait à se produire, le lac pourrait déborder.

Carrie-Ann Brophil :
Donc voici nos infrastructures principales. Si quelque chose arrivait, ça aurait un impact sur toute la partie au nord de l'État.

Commentaire voix-off :
Carrie-Ann Brophil fait partie de la municipalité. Elle s'inquiète du danger qui menace le village et des infrastructures cruciales.

Carrie-Ann Brophil :
Si ça venait à glisser, imaginons un gros morceau de la montagne qui se décroche et tombe dans le lac, ça provoquerait un tsunami et ça n'impacterait pas uniquement notre village et les personnes qui vivent à côté. Mais ça aurait un impact sur tout l'État. Ça bloquerait l'autoroute principale de l'Alaska, qui dessert d'un côté le port et de l'autre tout le reste de l'État.

Commentaire voix-off :
Pour étudier les risques, l'équipe repart sur le terrain. Ils ont repéré une zone à côté du lac qui pourrait être dangereuse. Ils veulent connaître ce qu'il se passe sous terre. Quel est l'état du pergélisol ? Est-il en train de se dégrader et à quelle vitesse ? Pour pouvoir répondre à ces questions, ils vont installer des capteurs de température à cinq endroits différents dans la montagne.

Costanza Morino :
Il y a un thermomètre pour l'air sur le dessus de chaque capteur et on a aussi un thermomètre pour le sol. Il y en a quatre en tout dans chaque dispositif. On va les laisser pendant un an, puis on les récupérera pour avoir des statistiques sur une année, ce qui nous permettra de créer un modèle. Grâce à cela, on pourra reconstituer l'état du pergélisol le long de la pente.

Commentaire voix-off :
Une fois le modèle établi, ils pourront se plonger dans le passé grâce aux données météorologiques. Et comprendre ainsi l'état du pergélisol. De quoi anticiper un potentiel glissement de terrain.

Susan Conway :
Si le pergélisol est vraiment en train de se dégrader super vite. Alors il faut qu'on commence à mettre d'autres capteurs et d'autres choses en place. Si en fait l'état du pergélisol est stable, on peut moins soucier. C'est un premier pas pour comprendre si c'est vraiment quelque chose et faut réagir vite ou c'est quelque chose. C'est peut-être dans 20 ans, c'est peut-être dans cent ans, qu'il va y avoir un problème

Commentaire voix-off :
Une chose est sûre, le sol de l'Alaska n'a pas fini de bouger. En plus de la fonte du pergélisol, les séismes fréquents participent aux glissements de terrain. L'investigation se poursuit sur d'autres zones difficiles d'accès. Ces études permettront d'en savoir plus sur ce pergélisol si précieux et pourtant invisible.

Auteur(s)

Production

Référent(s) scientifique(s)

Thématiques scientifiques

CNRS Images,

Nous mettons en images les recherches scientifiques pour contribuer à une meilleure compréhension du monde, éveiller la curiosité et susciter l'émerveillement de tous.