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© CNRS - 2025
Numéro de notice
8207
D'où viennent les fleurs ?
Elles dominent le monde végétal… mais leur origine reste un mystère. À Lyon, une équipe de scientifiques du CNRS tente de remonter à l'ancêtre commun de toutes les plantes à fleurs. Grâce à des fossiles, des expériences génétiques et des outils bioinformatiques, ils lèvent peu à peu le voile sur l'une des plus grandes questions dans l'histoire de l'évolution.
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Transcription
Commentaire voix-off :
Elles sont partout.
Les plantes à fleurs
sont les reines du règne végétal.
Si répandues et pourtant nous ne savons
toujours pas précisément
comment elles sont apparues sur Terre.
Une équipe de scientifiques
tente de déterminer là où tout a commencé,
de déterminer l'ancêtre de toutes les plantes à fleurs
qui existent aujourd'hui.
Charlie Scutt :
Toutes les plantes à fleurs
descendent de cet ancêtre commun
et elles ont toutes évolué.
Commentaire voix-off :
Ils vont utiliser
de puissants outils informatiques
pour remonter le temps génétique,
déterminer quels gènes
partagés par toutes les plantes à fleurs aujourd'hui
ont permis l'émergence
de ce nouvel embranchement
du règne végétal.
Marie Morel :
C'est en reconstruisant
l'histoire évolutive de ces gènes-là
qu'on espère pouvoir comprendre
comment les fleurs sont apparues.
Commentaire voix-off :
Nous sommes au Jardin botanique de Lyon
avec l'équipe de chercheurs du CNRS
qui mène l'enquête scientifique
pour mieux comprendre l'émergence
des plantes à fleurs.
Léa Rambaud-Lavigne :
On estime aujourd'hui qu'il y a
à peu près 300 000 espèces de plantes à fleurs.
Donc c'est vraiment très diversifié
en termes de tailles, de couleurs,
de formes et d'habitats.
On estime que les plantes à fleurs
sont apparues il y a environ 135 millions d'années.
En seulement 10 millions d'années,
on est passé d'un petit nombre
de plantes à fleurs
qu'on retrouve aujourd'hui sous forme de fossiles,
d'un petit nombre de fossiles,
à un nombre de plantes à fleurs
vraiment énorme.
On a beaucoup de fossiles
qui datent d'à peu près 10 millions d'années
après l'apparition
des premières plantes à fleurs.
Commentaire voix-off :
Une émergence
si rapide à l'échelle géologique
qu'elle fut qualifiée par Charles Darwin lui-même
d'"abominable mystère".
Charlie Scutt :
Darwin croyait que l'évolution
devait se faire très lentement.
Cette abrupte apparition et rapide
diversification le troublaient
et il avait même émis l'hypothèse que
peut-être, il y avait un continent
dans l'hémisphère sud
qu'on n'avait pas encore trouvé
et qui aurait pu être une sorte de refuge
d'où émergeaient les plantes à fleurs,
pour permettre à ces plantes
une plus lente évolution que l'évolution qu'il voyait
à travers les gisements fossiles.
Mais en fait non,
ce continent n'existe pas.
La réalité, c'est que l'évolution
peut parfois beaucoup s'accélérer.
L'apparition des plantes à fleurs a été abrupte,
suivie d'une période
de diversification très rapide.
Commentaire voix-off :
Ce que l'on sait, c'est que ce fameux ancêtre commun
devait être un gymnosperme,
une catégorie de plantes
qui ne produisent ni fleurs, ni fruits,
comme les conifères.
Deux types de gymnospermes éteints
sont candidats
pour être l'ancêtre des plantes à fleurs.
Et on en trouve des spécimens...
...dans les réserves
du Musée des Confluences de Lyon.
Ici reposent les restes fossilisés
d'un monde qui n'existe plus
depuis des millions d'années.
Toutes ces espèces, animaux, plantes,
sont les maillons de chaînes ininterrompues
qui relient les espèces entre elles
et qui remontent à l'origine de la vie sur Terre
il y a plus de 3 milliards d'années.
Grâce à ces fossiles
et, plus récemment, à la génétique,
nous avons pu reconstruire
l'arbre du vivant,
l'arbre dit phylogénétique
qui permet de retracer les liens
entre les différentes espèces
d'aujourd'hui et du registre fossile.
Un scientifique :
On s'aperçoit que quand même,
la conservation est différente
entre ces fossiles
qui sont un peu plus jaunâtres.
Charlie Scutt :
Dans l'arbre phylogénétique
des plantes à fleurs,
il y a un gros trou entre la branche
qui part vers les gymnospermes vivantes
et l'autre branche qui part
vers les plantes à fleurs vivantes.
On connaît les gymnospermes
depuis 300 millions d'années.
Ce sont des gymnospermes qui existaient
avant l'origine des plantes à fleurs.
C'est à partir de certains
de ces types de gymnospermes
que dérivent les plantes à fleurs.
Mais lesquelles ?
Commentaire voix-off :
En étudiant les fossiles de plantes,
les scientifiques ont identifié
deux candidats
qui pourraient être l'ancêtre
des plantes à fleurs.
On les appelle les caytoniales
et les bennettitales.
Charlie Scutt :
Vous savez s'il y a eu
des caytoniales en France ?
Commentaire voix-off :
Disparues aujourd'hui,
elles existaient il y a 135 millions d'années,
à l'époque de l'émergence
des plantes à fleurs.
Charlie Scutt :
Ces deux candidates, pour l'ancêtre
des plantes à fleurs, possèdent chacune
certaines des caractéristiques similaires
aux plantes à fleurs.
Les bennettitales possèdent
des organes mâles autour d'organes femelles
comme chez les plantes à fleurs,
avec, en plus, des sortes d'organes
de type pétales autour,
donc ça fait vraiment une sorte de fleur.
Et les grandes différences
entre les bennettitales et les fleurs,
c'est que les ovules restent nus,
alors que chez les caytoniales,
il n'y a pas de pétales.
Par contre, les ovules se développent à l'intérieur
d'une structure qui s'appelle la cupule.
Et peut-être que la cupule
serait le progéniteur
des structures qui entourent les ovules
chez les plantes à fleurs.
Commentaire voix-off :
Impossible de savoir qui était cette ancêtre
entre bennettitales et caytoniales
en étudiant uniquement les fossiles.
Mais l'histoire du passé évolutif
des plantes à fleurs a été archivée
sous forme de code, au sein même
des génomes des plantes actuelles.
En déchiffrant le code génétique
des plantes à fleurs actuelles,
les chercheurs en bioinformatique
espèrent retrouver les gènes
et descendants de gènes de leurs ancêtres.
Nous sommes au Laboratoire de biométrie
et biologie évolutive de Lyon
où l'on étudie le vivant
non pas avec des microscopes,
mais avec de puissants calculateurs.
Marie Morel :
On s'est intéressé
à deux familles de gènes :
une famille qui est importante
dans le développement des pétales,
et une famille qui est importante dans le développement
d'autres organes floraux.
On va regarder les similarités
et les différences entre ces gènes.
Plus le temps passe, plus il va y avoir
des différences entre les gènes.
Et donc on peut comme ça remonter dans le temps
en regroupant les gènes
en fonction de leurs similarités.
Commentaire voix-off :
L'équipe a ainsi pu montrer que les gènes
responsables de l'enveloppe de l'ovule
existaient très tôt, au moment
de l'émergence des plantes à fleurs.
Ce qui serait cohérent avec
les caytoniales étant leurs ancêtres.
Mais les études n'ont pas encore pu
écarter l'hypothèse "bennettitales" non plus.
Il faut attaquer le problème
de plusieurs côtés.
Parallèlement aux études bioinformatiques,
l'équipe basée à l'ENS de Lyon
réalise des expériences génétiques
directement sur le vivant.
Les études de bioinformatique permettent
de reconstituer les gènes ancestraux
de certaines fonctions
de fleurs actuelles.
Et c'est ainsi que l'équipe va tester
l'hypothèse "bennettitales".
Est-ce que les gènes responsables de pétales aujourd'hui,
recréés dans leur version ancestrale,
permettaient déjà de créer des pétales
il y a des millions d'années ?
Damien Genettais :
On a transformé des plantes
qui n'ont pas la capacité de former des pétales
avec le gène ancestral qui, actuellement,
est celui qui permet
la formation des pétales.
On va tremper les fleurs de nos plantes
dans cette solution de bactéries
qui a la capacité naturellement de transférer
une partie de son ADN aux plantes.
Et le but à terme de cette manipulation,
c'est de comprendre si le gène ancestral
est capable de restaurer des pétales
dans ces boutons qui n'en ont pas,
et donc de voir si cette fonction
était déjà présente dans l'ancêtre des plantes à fleurs.
Commentaire voix-off :
Même si le chemin de la recherche
sur cette question reste long,
quelques éléments de réponse
commencent à émerger.
Charlie Scutt :
Il est très difficile
de faire des conclusions très fermes
sur des événements qui ont eu lieu
il y a 130 millions d'années ou plus.
On peut faire des conclusions fermes
sur certains points
par exemple quel lignage de gènes aurait émergé
avant quel autre lignage de gènes.
Notre réponse prévisionnelle, c'est
que ce serait probablement les caytoniales
qui auraient les aspects caractéristiques nécessaires
pour être un ancêtre des plantes à fleurs.
Commentaire voix-off :
La recherche sur cette question
est un projet sur le long terme
impliquant de nombreuses équipes
françaises et à l'étranger.
Mais au fil des avancées en génétique,
en bioinformatique,
aux découvertes de nouveaux fossiles,
la réponse deviendra de plus en plus claire.
Et malgré le fait que ce ne soit pas exactement
la fin de l'abominable mystère de Darwin,
il s'agira de l'écriture d'une nouvelle page cruciale
de l'histoire des espèces
sur la planète Terre.